mercredi 13 novembre 2019

Comment caractériser le surcroît temporaire d'activité dans le cadre d'un contrat à durée déterminée (CDD)




Selon l'article L. 1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et, selon l'article L. 1242-2 du même code, il ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas qu'il énumère.

Il est constant « qu’en cas de litige sur le motif du recours, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat à durée déterminée » (not. Soc., 10 octobre 2018, n° 16-26.535 – Soc., 30 septembre 2014, n° 13-18.485 – Soc., 30 septembre 2014, n° 13-18.484).

Il appartient ainsi à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif d'accroissement temporaire de l'activité énoncé dans le contrat à durée déterminée (Soc., 16 octobre 2019, n° 17-30.918 – Soc., 21 novembre 2018, n° 17-21.803 – Soc., 8 novembre 2017, n° 16-18.007 – Soc., 18 février 2016, n° 14-11.805 – Soc., 18 novembre 2015, n° 14-20.187), faute de quoi la relation de travail est requalifiée pour une durée indéterminée (mêmes arrêts).

Cette preuve doit être rapportée « par référence à des données factuelles précises » (Soc., 23 juin 2016, n° 15-14.242) et à partir « d'éléments concrets et précis » (Soc., 20 septembre 2017, n° 16-13.362) et « par comparaison avec l'activité normale et permanente de la société » afin de pouvoir identifier « une augmentation inhabituelle de cette activité à laquelle l'entreprise ne pouvait faire face avec son effectif permanent » (Soc., 23 janvier 2019, n° 17-22.394).

Et pour apprécier la réalité du motif de recours au contrat à durée déterminée, le juge doit « se situer à la date de conclusion du contrat litigieux » (Soc., 10 avril 2019, n° 17-31.712).

Pour synthétiser, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif d'accroissement temporaire de l'activité, à partir de données factuelles, concrètes et précises, se situant à la date de conclusion du contrat litigieux qui mettent en évidence, par comparaison avec l'activité normale et permanente de la société, une augmentation inhabituelle de cette activité à laquelle l'entreprise ne pouvait faire face avec son effectif permanent.

La différence entre l'entre-aide familiale et le lien de subordination qui caractérise le contrat de travail


En vertu des articles 205 et 207 du code civil, les enfants doivent des aliments à leurs père et mère qui sont dans le besoin et cette obligation est réciproque.

Lorsque ce devoir est exécuté spontanément, il s’agit de l’entre-aide familiale.

Cependant l’existence de obligation alimentaire, et son exécution spontanée dans le cadre de l'entre-aide familiale, ne font pas obstacle à ce que soit reconnue l’existence d’une véritable relation de travail entre ces mêmes personnes.

Il est ainsi constant que, « compte tenu de l’obligation alimentaire existant entre ascendant et descendant et des manifestations de l’entre-aide familiale qui en découle, l’existence d’un contrat de travail doit être prouvé et le lien de subordination doit être caractérisé » (Soc., 14 janvier 1971, n° 69-13.123, Bull. n° 30 Soc., 2 mars 1966, n° 64-11.233, au Bull. n° 229 Civ. 2, 12 juillet 1961, n° 60-10.158, au Bull. n° 566).

La solution est constante (égal. Civ. 2, 3 février 2011, n° 10-12.194 Civ. 2, 20 mai 2010, n° 08-21.817 Soc., 15 mars 1973, n° 71-13.262, Bull. n° 166).

Classiquement, le lien de subordination caractérisé « par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné » (Soc., 28 novembre 2018, « Take it easy », n° 17-20.079, au Bull. – Soc., 13 novembre 1996, « Société générale » n° 94-13.187, Bull. n° 386).

Les critères retenus pour identifier un lien de subordination permettent – en creux – de cerner ce qui caractérise l'entre-aide familiale.

En terme d’horaires, pour que l'entre-aide familiale soit retenue, il faut que l’aide apportée soit « ponctuelle », « restreinte » (Soc., 21 janvier 1972, n° 70-13.060, Bull. n° 50 Soc., 28 juin 1973, n° 72-10.961, Bull. n° 434) « sans horaire précis » (Soc., 27 avril 1972, n° 71-10.550, Bull. n° 297) « occasionnelle » (Soc., 19 décembre 1978, n° 77-11.895, Bull. n° 890) – elle est en revanche exclue lorsque les horaires sont « conséquents » (Crim., 21 mars 2000, n° 99-85.105 Soc., 25 février 1976, n° 74-13.790, Bull. n° 119), « réguliers » (Soc., 27 mai 1970, n° 69-10.793) « habituels » (Civ. 2, 7 avril 2011, n° 10-15.909 Soc., 14 janvier 1971, n° 69-13.123, Bull. n° 30) « constants en fonction des heures d’affluence » (Soc., 7 décembre 1989, n° 86-14.055) et sur une longue période de temps (Crim., 3 juillet 1996, n° 95-81.288).

Concernant les tâches, pour que l'entre-aide familiale soit retenue, il faut que les tâches ne soient pas « précises » (Soc., 27 avril 1972, n° 71-10.550, Bull. n° 297) qu’elles ne soient pas « essentielles et nécessaires au fonctionnement » de l'entreprise (Civ. 2, 20 septembre 2018, n° 17-11.322 Civ. 2, 24 mai 2017, n° 15-27.112 Crim., 21 mars 2000, n° 99-85.105) qu’elles ne constituent pas une « participation active à l’exploitation » (Soc., 25 février 1976, n° 74-13.790, Bull. n° 119) ou que l’aidant « exerce une activité profitable » à celui qui est aidé (Soc., 7 décembre 1995, n° 94-10.408) : en somme, il faut que l’activité soit exercée de manière « ponctuelle » (Soc., 12 février 2014, n° 12-27.420) « à titre bénévole et limitée » (Soc., 30 mai 2000, n° 95-13.943, Bull. n° 211 Soc., 4 mai 1966, n° 64-13.269, au Bull. n° 418).

L’absence de rémunération, l’absence de « profit direct et personnel » pour l’aidant sont un indice supplémentaire d’une situation d’entre-aide familiale (Soc., 7 octobre 1976, n° 75-11.761, Bull. n° 479 Soc., 28 juin 1973, n° 72-10.961, Bull. n° 434 Soc., 4 mai 1966, n° 64-13.269, au Bull. n° 418) – alors qu’à l’inverse, le versement d’une rémunération est considéré comme un indice de l’existence d’une relation de subordination (Crim., 3 juillet 1996, n° 95-81.288 Soc., 27 mai 1970, n° 69-10.793).

Le critère cardinal de l'entre-aide familiale demeure que l’aidant garde son entière « liberté » vis-à-vis de la personne aidée :

« tant par motifs propres qu’adoptés, la cour d’appel, qui a souverainement apprécié les éléments de fait et de preuve, a estimé que Mme Y… avait participé aux activités de la société dans le cadre de l’entraide familiale et en toute liberté ; qu’elle a pu en déduire que la preuve d’un lien de subordination n’était pas établie » (Soc., 2 juillet 1997, n° 95-43.629)

En somme, dès lors que sont identifiés un lien d’ascendance ou de descendance entre deux personnes présentes sur un lieu de travail, l'organisme social – pour pouvoir opérer un redressement – doit démontrer que les relations qui unissent ces deux personnes excèdent une situation d'entre-aide familiale et que l’on est en présence d’un véritable lien de subordination.

Pour cela, il doit être mis en évidence :

- que la présence de l’aidant au sein de l'entreprise n’est pas ponctuelle, restreinte, occasionnelle, sans horaire précis,
- que les tâches accomplies sont précises, nécessaires au fonctionnement de l'entreprise et que l’aidant participe activement à l’exploitation,
- et que l’aidant a pu en retirer un profit direct et personnel.

mardi 5 novembre 2019

Sécurité sociale - Définition de l'accident du travail


L’accident du travail était classiquement défini comme toute lésion survenue « au temps et au lieu du travail », sauf à ce que la caisse ou l'employeur rapportent la preuve qu’elle résulterait « d’une cause totalement étrangère » (not. Civ. 2, 20 juin 2019, n° 18-20.431 – Civ. 2, 29 mai 2019, n° 18-16.183 – Civ. 2, 4 avril 2019, n° 18-14.915 – Civ. 2, 11 octobre 2018, n° 17-24.602 – Civ. 2, 15 février 2018, n° 16-27.903).

Mais la Cour de cassation a également admis que « constitue un accident du travail un événement ou une série d’événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l’occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d’apparition de celle-ci » (Soc., 2 avril 2003, n° 00-21.768, Bull. n° 132 – jurisprudence constante, not. Civ. 2, 5 novembre 2015, n° 14-10.131 – Civ. 2, 28 mai 2014, n° 13-17.368 – Civ. 2, 18 février 2010, n° 08-21.960 – Civ. 2, 17 décembre 2009, n° 08-21.598 – Civ. 2, 10 décembre 2009, n° 08-20.539 – Civ. 2, 14 mars 2007, n° 05-21.090).