lundi 31 mai 2021

L'interdiction de relever d'office une fin de non recevoir

Le juge ne peut relever d’office une fin de non-recevoir sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations.

- jurisprudence récente : Civ.2 25 mars 2021 n° 20-12.439 Civ.2 10 décembre 2020 n° 19-23.133 Civ.2 8 octobre 2020 n° 19-19.188 Civ.3 17 septembre 2020 n° 19-13.952 Civ.3 9 juillet 2020 n° 19-11.678 Civ.2 5 décembre 2019 n° 18-21.174 Civ.2 26 septembre 2019 n° 18-11.986 Civ.1 26 juin 2019 n° 18-15.158 Civ.1 26 juin 2019 n° 18-15.159 Civ.2 10 janvier 2019 n° 17-20.462 Civ.1 27 juin 2018 n° 17-19.574

- jurisprudence publiée : Civ.3 27 juin 2019 n° 17-25.949 B Civ.1 11 mai 2017 n° 15-26.646 B Civ.2 13 octobre 2016 n° 15-25.995 B Civ.2 21 février 2013 n° 11-27.051 B Soc. 17 mars 1994 n° 91-13.919 B n° 102 Com. 19 juillet 1988 n° 87-12.089 B n° 253 Com. 12 mai 1980 n° 78-16.586 B


JURISPRUDENCE RÉCENTE


Civ.2 25 mars 2021 n° 20-12.439

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

7. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

8. Pour déclarer irrecevables les demandes des consorts W... et celle de la caisse au titre de son recours subrogatoire de tiers payeur à l'encontre de la société, comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée, l'arrêt retient que la demande oppose les mêmes parties, qu'elle est identique à celle qui a été rejetée par l'arrêt du 13 février 2014 alors que les demandeurs pouvaient conclure sur la responsabilité de la Société dans l'inopposabilité de leur droit à indemnisation au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages et qu'il en va de même des demandes de la caisse. Il relève qu'il leur appartenait de soulever la faute éventuelle de la société tendant à la même fin d'indemnisation en temps utile dès les débats devant le tribunal correctionnel et devant la chambre correctionnelle de la cour d'appel.

9. En statuant ainsi, sans avoir invité les parties à présenter leurs observations sur cette fin de non-recevoir, dont elle n'était saisie par aucune des parties dans le dispositif de leurs conclusions, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


Civ.2 10 décembre 2020 n° 19-23.133

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

3. Selon ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.

4. Pour déclarer irrecevable, faute d'intérêt à agir, la demande de M. et Mme T... tendant à leur voir accorder un délai de paiement, l'arrêt relève que le jugement d'adjudication du 14 septembre 2018 dont ils ont relevé appel n'a pas, contrairement à ce qui est indiqué dans leur déclaration d'appel, fixé la créance de la banque et ordonné la vente forcée, de sorte qu'il a été interjeté appel de dispositions étrangères au jugement en cause.

5. En statuant ainsi, sans avoir invité les parties à présenter leurs observations sur la fin de non-recevoir, qu'elle relevait d'office, tirée du défaut d'intérêt de M. et Mme T... à agir pour demander un délai de paiement à la banque, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


Civ.2 8 octobre 2020 n° 19-19.188

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

3. Aux termes de ce texte que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

4. L'arrêt retient qu'en l'absence de décision de la commission de recours amiable sur l'accident du 25 avril 2013, la demande de reconnaissance au titre de la législation sur les risques professionnels de cet accident est irrecevable.

5. En statuant ainsi, sans avoir invité les parties à présenter leurs observations cette fin de non-recevoir, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


Civ.3 17 septembre 2020 n° 19-13.952

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

14. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

15. Pour déclarer la société Seem irrecevable à contester la mention « dans les limites de sa police d'assurance », énoncée dans le jugement rectificatif du 5 janvier 2017, la cour d'appel constate que ce jugement n'a pas été frappé d'appel, qu'il est définitif et qu'il a été exécuté par le règlement, le 2 février 2017, d'une somme de 104 932,32 euros de la société Axa France IARD à la société Aviva assurances.

16. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a relevé d'office une fin de non-recevoir sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations, a violé le texte susvisé.


Civ.3 9 juillet 2020 n° 19-11.678

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

3. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

4. Pour déclarer la demande des consorts B... irrecevable, l'arrêt retient qu'ils n'ont pas mis en cause l'ensemble des propriétaires de l'assiette du chemin.

5. En statuant ainsi, en relevant d'office une fin de non-recevoir, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


Civ.2 5 décembre 2019 n° 18-21.174

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour déclarer irrecevables les demandes de Mme J... contenues dans ses conclusions déposées le 15 juin 2017, constater que la créance de la banque à son encontre s'élève à un certain montant et ordonner la licitation du bien immobilier tel que désigné, l'arrêt retient que les prétentions de Mme J..., figurant dans ses dernières conclusions et nouvelles en cause d'appel, doivent être déclarées irrecevables ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur la fin de non-recevoir qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


Civ.2 26 septembre 2019 n° 18-11.986

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, qu'après avoir formé un recours contre la décision d'une commission de surendettement des particuliers qui avait déclaré irrecevable la demande qu'ils avaient formée en vue du traitement de leur situation, M. C... et Mme O... ont adressé par écrit leurs moyens au juge du tribunal d'instance, celui-ci n'ayant pas tenu d'audience ;

Attendu que pour dire irrecevable leur recours, le jugement, après avoir constaté que la décision de la commission de surendettement, du 23 février 2016, a été notifiée aux débiteurs le 27 février 2016, retient que, le délai de recours expirant le 14 mars 2016, le recours, formé par courrier adressé le 17 mars 2016 suivant, est hors délai ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur cette fin de non-recevoir relevée d'office, le juge du tribunal d'instance a violé le texte susvisé ;


Civ.1 26 juin 2019 n° 18-15.158

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué que, S... C... F..., mineur, originaire de Guinée, se prévalant d'un lien de filiation avec M. S... F..., réfugié en France depuis le 20 octobre 2009, s'est vu refuser sa demande de visa d'entrée en France, présentée au titre de la réunification familiale ; que, le 13 juillet 2015, Mme S... D... F..., agissant en qualité de représentante légale du mineur, a assigné M. S... F... ainsi que le ministère public en établissement du lien de filiation ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande, l'arrêt retient que le mineur et sa mère ne justifient pas d'un état civil probant au sens de l'article 47 du code civil ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur cette fin de non-recevoir relevée d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


Civ.1 26 juin 2019 n° 18-15.159

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué que, Z... O... S... Q..., mineure, originaire de Guinée, se prévalant d'un lien de filiation avec M. F...Q..., réfugié en France depuis le 20 octobre 2009, s'est vue refusée sa demande de visa d'entrée en France, présentée au titre de la réunification familiale ; que, le 13 juillet 2015, Mme F...S... Q..., agissant en qualité de représentante légale de la mineure, a assigné ce dernier ainsi que le ministère public en établissement du lien de filiation ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande, l'arrêt retient que la mineure et sa mère ne justifient pas d'un état civil probant au sens de l'article 47 du code civil ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur cette fin de non-recevoir relevée d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


Civ.2 10 janvier 2019 n° 17-20.462

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte authentique du 25 avril 2006, la société Pegot a vendu à la société civile immobilière Imanoo ayant pour gérant M. X..., un local à usage de bureau dont le prix a été financé à l'aide d'un prêt consenti par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne (CRCAM) pour lequel M. X... s'est porté caution solidaire ; que la CRCAM a fait inscrire, les 29 novembre 2013 et 3 mars 2014, deux hypothèques provisoires à l'encontre de M. X... ; que M. et Mme X... ont, le 8 août 2014, saisi le juge de l'exécution d'un tribunal de grande instance pour obtenir la mainlevée de ces mesures et le cantonnement de la créance ; que la CRCAM a publié une nouvelle hypothèque provisoire le 17 octobre 2014 pour garantir la même créance qui est devenue définitive le 19 janvier 2015 ;

Attendu que, pour déclarer irrecevables les demandes de mainlevée et de cantonnement de l'inscription hypothécaire définitive du 19 janvier 2015, l'arrêt retient qu'elles constituent des demandes nouvelles en ce qu'elles ne tendent pas aux mêmes fins que celles de première instance puisqu'elles portent désormais sur une hypothèque définitive et non plus provisoire et qu'elles seront d'office déclarées irrecevables en application de l'article 564 du code de procédure civile ;

Qu'en relevant d'office cette fin de non-recevoir sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


Civ.1 27 juin 2018 n° 17-19.574

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 2 novembre 2011, Mme Z... (l'acquéreur) a acquis de la société Joubert (la société) un mobil-home, pour la somme de 4 500 euros, payée pour moitié en espèces, et pour moitié par chèque ; qu'alléguant un défaut d'étanchéité du véhicule constaté le surlendemain de la vente, l'acquéreur a fait opposition au paiement du chèque précité ; que, la société ayant obtenu, le 19 juin 2012, une ordonnance portant injonction de payer le solde du prix de vente, l'acquéreur a formé opposition à cette ordonnance et sollicité la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés ;

Attendu que, pour dire irrecevable comme prescrite l'action en résolution de la vente pour vice caché, l'arrêt retient que, bien qu'ayant découvert le vice d'étanchéité dans les quarante-huit heures de la livraison du bien, le 4 novembre 2011, l'acquéreur n'a formé sa demande en résolution de la vente qu'à l'audience du 23 septembre 2014, hors du délai biennal de prescription ;

Qu'en statuant ainsi, en relevant d'office la fin de non-recevoir tirée de la prescription, sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


JURISPRUDENCE PUBLIÉE


Civ.3 27 juin 2019 n° 17-25.949 B

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour "rejeter" la demande relative au revêtement de l'étage, l'arrêt retient qu'elle est nouvelle en cause d'appel ;

Qu'en statuant ainsi, en relevant d'office cette fin de non-recevoir sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


Civ.1 11 mai 2017 n° 15-26.646 B

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande tendant à la communication de l'inventaire des meubles dressé lors des opérations d'expulsion, l'arrêt retient que le propriétaire ne l'a pas formulée en première instance et qu'il n'a pas qualité à agir, dès lors que les biens visés par cet inventaire, prévu à l'article R. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution pour protéger les intérêts de la personne expulsée, appartiennent au locataire ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ces fins de non-recevoir relevées d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


Civ.2 13 octobre 2016 n° 15-25.995 B

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Résidence du Mont Vert (la société) a relevé appel du jugement rendu par un tribunal de grande instance dans un litige l'opposant à M. et Mme X... ; que ces derniers ont déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré cet appel recevable ;

Attendu que, pour déclarer l'appel irrecevable, l'arrêt retient que, dès lors que la voie de l'appel incident avait été ouverte à la société, dans les conditions prévues par l'article 550 du code de procédure civile, sur l'appel principal précédemment formé par M. et Mme X..., mais que celle-ci s'était trouvée forclose en son appel incident pour s'être abstenue de le former dans le délai de deux mois qui lui était imparti, en sa qualité de partie intimée, par l'article 909 du code de procédure civile, elle n'était pas recevable à relever appel principal du jugement précédemment attaqué par M. et Mme X..., l'absence de signification de ce jugement étant indifférente ;

Qu'en relevant d'office cette fin de non-recevoir sans avoir invité les parties à présenter leurs observations, au motif inopérant qu'elle avait déjà été débattue devant le conseiller de la mise en état, alors que M. et Mme X... avaient conclu à la recevabilité de l'appel principal de la société dans leur requête en déféré, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


Civ.2 21 février 2013 n° 11-27.051 B

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, qu'après avoir formé un recours contre la décision d'une commission de surendettement des particuliers qui avait déclaré irrecevable la demande qu'elle avait formée en vue du traitement de sa situation, Mme X..., autorisée à ne pas comparaître, a adressé par écrit ses moyens au juge de l'exécution ;

Attendu que pour dire irrecevable le recours de Mme X..., le jugement retient que la décision de la commission de surendettement datée du 6 avril 2010 a été notifiée par lettre recommandée reçue le 10 avril 2010 et que le recours formé par un courrier envoyé le 26 avril suivant est hors délai ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur cette fin de non-recevoir relevée d'office, le juge de l'exécution a violé le texte susvisé ;


Soc. 17 mars 1994 n° 91-13.919 B n° 102

Vu l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que Mme X... n'étant ni présente ni représentée à l'audience, le Tribunal a relevé d'office la fin de non-recevoir tirée de la prescription sans avoir invité préalablement les parties à présenter leurs observations ;

En quoi il a violé le texte susvisé ;


Com. 19 juillet 1988 n° 87-12.089 B n° 253

Vu l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que pour déclarer irrecevable l'exception de compensation dont se prévalait M. X..., la cour d'appel a retenu que ce dernier ne rapportait pas la preuve qu'il avait produit les créances qu'il invoquait au passif de la liquidation des biens de la SPAT ;

Attendu qu'en se prononçant de la sorte sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur la fin de non-recevoir qu'elle soulevait d'office, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;


Com. 12 mai 1980 n° 78-16.586 B

VU L'ARTICLE 16 DU DECRET DU 9 SEPTEMBRE 1971 :

ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE BOSQUET, EN QUALITE DE SYNDIC DU REGLEMENT JUDICIAIRE DE BROQUET, IRRECEVABLE EN SA DEMANDE EN PAIEMENT DIRIGEE CONTRE OUAMAR AU MOTIF QUE, SEUL, BROQUET, ASSISTE DE SON SYNDIC, POUVAIT INTENTER UNE TELLE ACTION ;

ATTENDU CEPENDANT QU'EN RETENANT D'OFFICE CETTE FIN DE NON-RECEVOIR, FUT-ELLE D'ORDRE PUBLIC, SANS AVOIR PREALABLEMENT INVITE LES PARTIES A PRESENTER LEURS OBSERVATIONS, LA COUR D'APPEL A VIOLE LE TEXTE SUSVISE ;






samedi 29 mai 2021

L’autorité de la chose décidée par les organismes sociaux et la non rétroactivité de leurs décisions


                

Les décisions prises par les organismes sociaux sont soumises au principe de l’autorité de la chose décidée et au principe de non rétroactivité qui en découle.


La Cour de cassation se réfère directement, dans ses visas ou ses conclusifs, au « principe de l’autorité de la chose décidée » (not. Soc., 13 janvier 1977, n° 76-10.607, Bull. n° 32).


Ce principe est opposable à l’assuré social :


– « quel que soit le bien ou le mal fondé » des décisions d’affiliation ou de radiation, l’autorité de la chose décidée qui s’y attache, fait notamment obstacle à ce que l’assuré social puisse utilement les contester au stade des redressements pratiqués par l’organisme de recouvrement (not. Soc., 12 mars 1992, n° 89-16.092 et Soc., 11 février 1993, n° 88-18.825).


– de même, « la décision individuelle d’affiliation, devenue définitive, qu’elle fût fondée ou non, et que l’assuré eût perçu ou non de ce régime des prestations d’assurance maladie, ne pouvait être mise à néant rétroactivement et s’oppose à la demande de remboursement des cotisations versées à ce titre » (Civ. 2, 28 novembre 2013, n° 12-26.292).


Le principe est également opposable aux organismes sociaux : « quels qu’aient pu être les motifs, fussent-ils erronés, qui l’avaient provoquée, l’autorité qui s’attache à la chose décidée sans fraude s’oppose à ce que soit reconnu un effet rétroactif à la décision qui la modifie » (Soc., 13 mai 1976, n° 75-10.495, Bull. n° 279), seule « la fraude » permet à l’organisme de recouvrement et au juge d’écarter l’autorité de la chose précédemment décidée (Soc., 27 novembre 1975, n° 74-12.181, Bull. n° 576).


De l’autorité de la chose décidée découle, comme corollaire, le principe de non rétroactivité, synthétisé dans un arrêt publié du 26 février 1981 : « le régime de protection sociale est d’ordre public, son application ou sa régularisation peuvent être effectuées à tout moment sous la réserve que, en cas de changement d’interprétation, les décisions prises à son sujet ne soient pas rétroactives » (Soc., 26 février 1981, n° 80-10.566, au Bull.).


Ainsi, compte tenu de l’autorité de la chose décidée dont elle est revêtue, la décision de reconnaissance de l’origine professionnelle de l’accident ne saurait être remise en cause par une décision ultérieure prise dans le cadre d’une rechute de cet accident (not. Soc., 15 novembre 1990, n° 89-10.619, Bull. n° 565).


De même, l’annulation pour excès de pouvoir d’un arrêt ministériel, sur le fondement duquel un organisme social a pris une décision, ne saurait remettre en cause cette décision en raison de l’autorité de la chose décidée qui y est attachée (not. Soc., 8 février 1973, n° 71-12.969, Bull. n° 71).


L’illustration la plus topique du principe de l’autorité de la chose décidée, conjugué à celui de non rétroactivité, est la solution par laquelle la Cour de cassation retient que la première décision administrative individuelle d’affiliation s’oppose, « quel que soit son bien ou mal fondé » à ce que l’immatriculation ultérieure à un autre régime puisse mettre « rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l’affiliation antérieure » (not. Soc., 24 mai 2018, n° 16-19.896 – Civ. 2, 17 décembre 2015, n° 14-25.906, Bull. n° 841 – Civ. 2, 26 novembre 2015, n° 14-24.615, Bull. n° 840 – Soc., 22 septembre 2015, n° 13-28.065 – Civ. 2, 28 novembre 2013, n° 12-26.292 – Soc., 31 janvier 2012, n° 10-26.513 – Soc., 13 octobre 2011, n° 10-13.710 – Soc., 15 novembre 2001, n° 00-12.031 – Soc., 11 octobre 2001, n° 00-10.802, Bull. n° 318 – Soc., 9 avril 1998, n° 96-18.706, Bull. n° 209 – Soc., 2 avril 1998, n° 95-13.851 – Soc., 27 octobre 1993, n° 90-42.620 – Soc., 27 février 1992, n° 89-20.538, Bull. n° 141 – Soc., 30 janvier 1992, n° 89-14.528 – Soc., 28 février 1991, n° 88-12.436, Bull. n° 109 – Soc., 1 mars 1990, n° 87-15.176 – Soc., 1 février 1990, n° 87-15.176 – Soc., 14 juin 1989, n° 86-16.750, Bull. n° 449 – Soc., 16 novembre 1988, n° 86-12.345, Bull. n° 601).


En somme, même lorsqu’elle procède de « motifs erronés », même lorsqu’elle est « mal fondée », la décision régulièrement prise par un organisme social s’impose à celui-ci comme à l’assuré social ; une décision ultérieure de l’organisme social ne saurait rétroactivement remettre en cause cette décision initiale, alors même qu’elle résulterait d’une erreur avérée.


Si, dans les autres branches du droit, l’erreur n’est pas créatrice de droit et peut être corrigée (not. Soc., 24 septembre 2014, n° 13-16.562 – Soc., 2 juin 2004, n° 02-40.104 – Civ. 3, 21 février 1995, n° 93-13.162), en droit de la sécurité sociale – compte tenu du principe de l’autorité de la chose décidée et du principe de non rétroactivité – une décision erronée et mal fondée est créatrice de droit et s’impose à l’organisme social comme à l’assuré social.