jeudi 16 septembre 2021

Droit d’alerte - Action en substitution - Préjudice du salarié







L'exercice du droit d'alerte et l'action en substitution qui a pour objet de faire faire cesser une atteinte aux droits des personnes n'empêche pas le salarié d'engager ultérieurement une action au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail

Arrêt analysé : 
Soc. 8 septembre 2021 n° 20-14.011



LES FAITS


3. Par jugement du 26 novembre 2013 devenu définitif, le conseil des prud’hommes de Paris, saisi par la Fédération CFTC-CMTE d’une action fondée sur l’article L. 2313-2 du code du travail, a rejeté la demande d’enquête du syndicat sur les faits de harcèlement moral dont la salariée aurait été victime.


4. Mme [Y] a saisi le 11 juin 2013 la juridiction prud’homale en vue de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail, condamner la société Baccarat à lui verser diverses sommes au titre de l’exécution et de la rupture de ce contrat et ordonner une expertise afin de procéder à sa reconstitution de carrière et de rémunération.


LE DROIT


➜ le droit d’alerte 

➜ l’action en substitution



Article L1121-1


Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.


Article L2312-59 (L2313-2 avant 2017)


Si un membre de la délégation du personnel au comité social et économique constate, notamment par l'intermédiaire d'un travailleur, qu'il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l'employeur. Cette atteinte peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel ou moral ou de toute mesure discriminatoire en matière d'embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement.


L'employeur procède sans délai à une enquête avec le membre de la délégation du personnel du comité et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.


En cas de carence de l'employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte, et à défaut de solution trouvée avec l'employeur, le salarié, ou le membre de la délégation du personnel au comité social et économique si le salarié intéressé averti par écrit ne s'y oppose pas, saisit le bureau de jugement du conseil de prud'hommes qui statue selon la procédure accélérée au fond.


Le juge peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser cette atteinte et assortir sa décision d'une astreinte qui sera liquidée au profit du Trésor.



➜ LE PRINCIPE “NUL NE PLAIDE PAR PROCUREUR”

➜ la question de la qualité à agir


Com. 14 avril 2015 n° 13-28.377 

sa qualité d'actionnaire majoritaire ne permet pas à la société Mobilitas, sauf à méconnaître la règle « nul ne plaide par procureur », de se substituer à sa filiale pour intenter à ses lieu et place une action judiciaire visant à la réparation d'un préjudice personnel prenant sa source dans le préjudice subi par cette seule filiale


Com. 30 octobre 2012 n° 11-23.034

Mais attendu que l'arrêt retient, d'un côté, que sauf à méconnaître la règle selon laquelle « nul ne plaide par procureur », l'emprunteur, quelle que soit sa qualité, ne peut se substituer à la société pour intenter en ses lieu et place une action en responsabilité contre la banque de l'entreprise qui lui permettrait d'obtenir réparation d'un préjudice personnel prenant sa source dans celui subi par la société,



LA SOLUTION


Pour la cour d'appel 


  • l’action en substitution permet à une organisation syndicale d’intervenir en lieu et place d’un salarié

  • celui-ci ne peut intenter une action à son tour mais seulement intervenir à l’instance

  • l’achèvement d’une procédure engagée par le syndicat en faveur du salarié lui fait perdre la faculté d’engager une action ultérieure

  • la saisine du conseil des prud’hommes par la salariée est fondée sur les mêmes motifs et a le même objet que l’action engagée par la fédération


Pour la Cour de cassation


Article 1355 du code civil (ancien 1351)

l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité


le principe de l’autorité de la chose jugée ne fait pas obstacle à ce que, suite à un jugement rendu par la juridiction prud’homale sur le fondement de l’article L. 2313-2 du code du travail, dont l’objet est de faire ordonner les mesures propres à faire cesser une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles, le salarié intéressé engage ultérieurement une action au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail.